La texture est un des piliers des qualités organoleptiques d’un produit alimentaire. Véritable signature sensorielle reconnaissable par le consommateur, la texture est également un levier d’innovation. C’est pourquoi les industriels de l’agroalimentaire doivent soigner la formulation, le choix des ingrédients et des technologies qui impactent la texture d’un produit. Découvrez dans cet article quels sont les différents types de textures et comment on peut suivre et mesurer cette qualité.
Qu’est-ce qui définit une texture ?
La texture d’un aliment fait partie des propriétés sensorielles et organoleptiques liées à la sensation en bouche. Selon la scientifique américaine Alina Surmacka Szczesniak spécialiste dans les aliments, « la texture est la manifestation sensible et fonctionnelle des propriétés structurales, mécaniques et de surface des aliments détectées par les sens de la vision, l’ouïe, ainsi que le toucher et les perceptions kinesthésiques ». La texture d'un aliment dépend ainsi des caractéristiques surfaciques du produit, par exemple s’il y a une croûte croustillante ou une mousse en périphérie. Elle dépend également aussi de ses propriétés mécaniques, c’est à dire comment va être modifié le produit sous l’effet de la mastication, de la salive et du malaxage de la langue. Les récepteurs du toucher, présents par exemple dans les mâchoires, permettent de ressentir des sensations liées aux caractéristiques gluantes, friables ou pétillantes d’un aliment. Ainsi, la texture d’un aliment va être définie par une sensation en bouche, mais pas seulement, perceptible par les mécano-récepteurs, les récepteurs tactiles et éventuellement les récepteurs visuels et auditifs.
La texture est aussi déterminée par la combinaison des ingrédients de base de la recette, par la technologie et le processus de fabrication ainsi que par les additifs texturants.
● La technologie et le processus de fabrication sont les axes majeurs de la création de texture. Par exemple, la cuisson-extrusion est un procédé de transformation des aliments qui fait désormais croustiller notre assiette : céréales pour petit-déjeuner, confiseries, biscuits ou snacks apéritifs… Elle est aussi utilisée pour la production de fromages fondus ou de surimi, la solubilisation de fibres telles que les pectines et autres hémicelluloses. La technologie de granulation transforme quant à elle la texture de matières premières sous forme de poudre. Le trempage va permettre de ramollir et attendrir une matière trop dure. Autre exemple : le processus de fabrication pour la qualité d’une crème glacée est déterminant. La technologie de foisonnement permet, par l’adjonction de bulles de gaz dans la crème, d’obtenir cette texture si connue de dessert glacé. Mais le goût ainsi que la texture du produit peuvent être affectés si l’on ajoute trop de bulles de gaz. Ainsi la technologie et le
processus de fabrication sont déterminants sur la qualité de la texture d’un aliment.
● Les additifs comme les Polyphosphates (E452) sont souvent utilisés dans les charcuteries, pour retenir l"eau et assurer une meilleure tenue du produit. Les Lécithines (E322) sont utilisés pour harmoniser la texture des aliments qui contiennent du gras et de l’eau, en favorisant l’émulsion.
● Les agents texturants permettent de modifier la texture d’un produit. L’industrie agroalimentaire a également à sa disposition les polysaccharides comme la caroube (E410), le guar (E412) et le xanthane (E415) qui sont des épaississants alimentaires courants.
● Les protéines sont aussi employées pour leurs propriétés gélifiantes, moussantes, émulsifiantes, épaississantes. En fonction de leur origine, elles possèdent des propriétés fonctionnelles particulièrement intéressantes et sont considérées comme des ingrédients. De plus, elles apportent une valeur ajoutée au produit fini sur le plan nutritionnel, ce qui est bénéfique pour les consommateurs.
Quelques définitions utiles autour des textures
Texture : dans l'industrie agroalimentaire, la texture est l'ensemble des propriétés rhéologiques (viscosité et résistance à l’écoulement) et de structure d’un aliment.
Propriétés ou qualités organoleptiques : ensemble des caractéristiques d’un produit perçues et évaluées par les sens du consommateur ou d’un expert, en analysant l’aspect visuel, la texture, le goût, l’odeur, les arômes. Les propriétés organoleptiques peuvent être évaluées lors d’une séance d’analyse sensorielle et formalisées avec un profil sensoriel.
La rhéologie (du grec rheo, couler et logos, étude) est l'étude de la déformation et de l'écoulement de la matière sous l'effet d'une contrainte appliquée. (Définition Eugène Bingham)
Quels sont les différents types de textures en agroalimentaire ?
Douce, lisse, rugueuse, granuleuse, soyeuse… l'ingénierie des textures permet aujourd’hui de concevoir tout type de formes et de structures d’aliments. Par exemple la tendreté de la viande, l’onctuosité et la fermeté des fromages, le fondant d’un chocolat, l’aspect collant du riz ou encore un biscuit sec qui peut être craquant, friable, dur ou croustillant, sont autant de caractéristiques liées à la texture.
La texture est une caractéristique technologique qui permet aussi d'offrir une palette de produits à partir d’un même ingrédient. Par exemple, en jouant sur celle-ci, il y a différentes utilisations possibles pour consommer du lait : sous forme liquide, épaisse (crème dessert), ferme (fromage), congelée (crème glacée), aérée (mousse), gélifiée (flan). Un travail sur les textures permet de développer des produits bi-texturés, comme les crèmes dessert ou fromages blancs avec une mousse de lait en surface pour le plus grand plaisir des consommateurs. Cette approche repose sur la capacité des macromolécules qui peuvent épaissir ou gélifier un liquide en modifiant son comportement rhéologique*. Un gel peut être thermoréversible ou thermorésistant selon sa composition et permettre de stocker ou d’utiliser un produit de manière plus facile.
Concrètement, comment mesure-t-on une texture ?
Différentes méthodes mesurent les paramètres texturant, telles que :
● Des méthodes fondamentales qui mesurent la viscosité, la résistance, la fragilité et la dureté d’un matériau alimentaire.
● Des méthodes empiriques basées sur les principes fondamentaux de la déformation induites par les technologies et procédés de fabrication : la flexion, le cisaillement et la compression.
● Il existe aussi des analyses instrumentales qui permettent d’étudier la stabilité de la texture lors du transport ou avec le conditionnement et l’emballage. Des instruments de mesure sont utilisés pour évaluer une texture. Le viscosimètre (photo 1) permet de déterminer la fluidité (la viscosité) d'un produit. La viscosité est importante à la fois pour la texture finale des produits et pour les contraintes de production. Le texturomètre (photo 2) mesure la dureté, l'élasticité, le collant, la masticabilité, l'adhésion et la cohésion d'un produit. Ces principes fondamentaux de mécanique et de rhéologie peuvent être appliqués afin de mieux comprendre les comportements de ces substances dans leur état natif ou après avoir été modifiés par le processus de fabrication.
● Des analyses sensorielles peuvent également être réalisées pour avoir l’appréciation des consommateurs vis-à-vis de la texture et des autres caractéristiques essentielles du produit comme le goût et l’odeur. L'analyse sensorielle est un ensemble de méthodes permettant de mesurer les perceptions sensorielles (vue, ouïe, odorat, goût, toucher). On parle aussi de sensométrie ou de métrologie sensorielle.
Levier d’innovation produit, point de différentiation de marché, facteur de fidélisation du consommateur : la texture d’un aliment ne doit pas être laissée au hasard par les industriels de l’agroalimentaire. Ces derniers peuvent utiliser de multiples procédés de fabrication ou agents texturant tels que les protéines fonctionnelles pour développer les nouveaux aliments de demain.