La texture est un des piliers des qualités organoleptiques d’un produit alimentaire. Aujourd’hui, les industriels de l’agroalimentaire ont bien compris que la texture est également un levier d’innovation et de différenciation marketing. Plus que jamais, la texture doit être synonyme de plaisir et offrir une expérience de consommation, agréable… et parfois surprenante. Laurent Gasnier, directeur marketing d’Armor Protéines nous explique dans cette interview la manière dont la texture influence la perception d’un aliment par le consommateur et quelles sont les tendances à venir.
En quoi la texture est un levier d’innovation et de différenciation marketing, Laurent Gasnier ?
La texture permet aujourd’hui aux industriels de l’agroalimentaire d’innover, mais aussi de surprendre et de satisfaire le consommateur. C’est également l’un des éléments identitaires du produit, qui lui confère son originalité et permet à l’industriel de se différencier.
- La texture est un véritable enjeu dans les produits de substitution d’un produit originel, par exemple pour un beurre allégé ou une margarine. Les consommateurs de ces produits vont rechercher une texture proche du beurre tendre, un produit connu et apprécié pour sa tartinabilité et sa texture en bouche. Il faut que l’on puisse retrouver dans un produit de substitution, les mêmes sensations et le même plaisir.
- La texture est aussi un levier de différenciation sur un marché concurrentiel. D’ailleurs la texture fait partie du marketing mix produit ! Je dirai même que la texture peut devenir une véritable signature sensorielle du fabricant. Regardez le marché ultra-concurrentiel des fromages frais aux herbes. Dans les publicités, c’est la texture foisonnée du fromage qui est mise en avant et le plaisir lors de la dégustation. Lors de dégustation à l’aveugle de ces produits, la majorité des consommateurs adeptes de cette catégorie peuvent différencier un produit seulement grâce à sa texture. C’est donc un élément majeur pour trouver sa singularité.
- De plus, la texture permet de segmenter une offre produit. C'est le cas du marché des crèmes laitières épaisses, semi-épaisses et liquides. Effectivement, l’offre est segmentée en rayon de supermarché, par texture et disposée par famille en fonction du parcours d’achat : de la gauche vers la droite ou inversement. Cette logique se retrouve dans beaucoup de rayons alimentaires, ce
qui montre bien l’importance de la texture dans la réflexion sur le produit. - Enfin, les textures évoluent et sont une vraie source d’innovation ! Avec les nouvelles technologies, on peut obtenir des structures particulières comme les bitextures combinant fondant et craquant. De même, l’ajout de pétillant et croustillant dans certains gâteaux crée un effet sonore lors de la dégustation. Le mélange de textures est aussi utilisé dans l’industrie laitière avec des desserts lactés alliant un coulis fruité, sous une crème fondante, recouverte de mousse et de pépites croustillantes. D’autres innovations sur la texture proposent d’encapsuler des molécules d’arômes qui sont libérées lors de la mastication de l’aliment. Ces innovations sur la texture offrent une expérience insolite au consommateur.
En tant que responsable marketing d’Armor Protéines, pensez-vous que les textures influencent la perception du produit par le consommateur?
L’appétit du consommateur peut être déclenché par la perception d’une texture qui éveille sa curiosité et l’incite à l’achat… et au ré-achat ! Je pense que la texture est cruciale dans la fidélisation de l’acheteur. Savez-vous pourquoi ? Car il est nécessaire que le produit délivre des sensations qu’il voudra vivre à nouveau. Tous les sens sont impactés par la texture notamment l’ouïe, le toucher et le visuel. Écouter la croûte de pain craquer sous vos doigts, la pétillance d’un soda, voir la peau d’un poulet se dorer qui va croustiller à la dégustation… La texture peut vous faire saliver avant même de consommer un aliment !
Tout comme il y a des tendances sur les saveurs, pensez-vous qu’il y a aussi des tendances sur les textures ?
Oui tout à fait ! Le consommateur est toujours à la recherche de nouveauté et de nouvelles sensations. La texture est la structure de l’aliment. Ainsi on peut toujours innover en partant de cette base et en recréer de nouvelles. En Europe, l’intérêt pour tester de nouvelles textures est bien présent selon Mintel (GNPD).
Parler de texture dans notre alimentation évoque immédiatement la stimulation des sens. On a tous une expérience personnelle différente. D’ailleurs, la relation à la texture est un des premiers sens développés chez l’enfant. La sensibilité à la texture varie aussi selon les cultures avec des préférences qui changent selon les pays. Par exemple, le vocabulaire français utilise environ 220 mots pour parler des textures tandis qu’au Japon, il en existe le double. Ainsi, les Japonais aiment par exemple beaucoup les textures pâteuses (patate douce, pâte de haricots rouges) ou gélatineuses avec l’utilisation de l'agar-agar. Pour conclure, je dirai que plus que jamais, la texture doit être abordée non seulement sous un aspect technologique, mais aussi comme un puissant levier marketing. Les consommateurs recherchent une expérience de consommation qui touchent tous leurs sens. C’est pourquoi chez Armor Protéines, nous travaillons chaque jour à proposer des ingrédients nutritionnels et fonctionnels avec des propriétés texturantes pour nos clients de l’agroalimentaire.